Perméthrine dans les logements : un risque élevé pour la femme enceinte et les enfants
La perméthrine, un insecticide largement utilisé dans les logements pour lutter contre les nuisibles tels que les moustiques, les puces et les punaises de lit, est l’un des pesticides les plus fréquemment mesurés dans les logements. Bien que cette substance soit généralement considérée comme peu toxique pour les humains lorsqu’elle est utilisée correctement, des questions se posent concernant les risques liés à une exposition chronique, en particulier pour les femmes enceintes et les jeunes enfants, deux groupes particulièrement vulnérables.
Qu’est-ce que la perméthrine ?
La perméthrine fait partie de la famille des pyréthrinoïdes, des insecticides synthétiques qui imitent l’action des pyréthrines, substances naturelles issues de certaines fleurs comme les chrysanthèmes. Elle est utilisée dans une variété de produits ménagers tels que les aérosols insecticides, les produits pour le traitement vétérinaire des animaux domestiques contre les puces et les tiques, les vêtements et les textiles imprégnés, ainsi que dans des lotions et crèmes médicales pour traiter des affections comme la gale ou les poux. Son efficacité à tuer ou repousser les insectes a fait de la perméthrine un choix populaire pour le contrôle des nuisibles dans de nombreux foyers.
En France, l’utilisation de le perméthrine est aujourd’hui interdite en agriculture mais elle est autorisée pour les usages domestiques, le traitement du bois et les utilisations professionnelles.
Pourquoi la perméthrine est-elle fréquemment retrouvée dans les logements ?
Plusieurs éléments permettent d’expliquer pourquoi la perméthrine est le pesticide le plus couramment mesuré dans les logements. Les résultats des campagnes de mesure montre une contamination d’au moins de 90% des foyer. Tout d’abord, son usage est généralisé car elle est présente dans de nombreux produits et objets du quotidien. De nombreux foyers utilisent régulièrement des sprays et des produits antiparasitaires à base de perméthrine, souvent sans réaliser que des résidus peuvent persister longtemps après leur application.
Si vous possédez des animaux domestiques, les traitements vétérinaires contre les tiques et les puces peuvent contenir de la perméthrine ou un autre insecticide et sont à l’origine d’une pollution de l’environnement intérieur. Attention, la perméthrine est mortelle pour les chats.
Certains matériaux comme le bois, les tissues et les literies sont traités avec de la perméthrine. Cependant le consommateur n’est pas informé de sa présence et des risques de pollution de l’air intérieur.
En outre, la perméthrine est un produit stable dans les environnements intérieurs, ce qui signifie qu’elle peut persister sur les surfaces, dans la poussière domestique ou dans les textiles pendant des semaines, voire des mois. Contrairement à l’extérieur où la lumière solaire, la pluie et le vent contribuent à dégrader plus rapidement les pesticides, les environnements intérieurs offrent des conditions où la perméthrine se décompose beaucoup plus lentement. Ainsi, la perméthrine a tendance à s’accumuler dans l’environnement intérieur et l’exposition des occupants est alors permanente.
De plus, les comportements des occupants contribuent également à sa présence persistante. Les jeunes enfants, qui passent beaucoup de temps à jouer sur le sol et ont tendance à mettre leurs mains ou des objets dans leur bouche, peuvent être exposés, en plus de l’inhalation, par ingestion aux résidus de perméthrine présents dans la poussière ou sur les surfaces.
Exposition chronique : un risque réel pour la femme enceinte
L’exposition chronique à la perméthrine soulève des préoccupations spécifiques pour les femmes enceintes. Bien que les études humaines sur les effets de la perméthrine pendant la grossesse soient très limitées, des recherches sur les animaux indiquent des risques pour le développement fœtal.
Les études sur animaux montrent que des doses élevées de perméthrine peuvent entraîner des malformations congénitales, un retard de croissance intra-utérin et des perturbations du développement neurologique. Le cerveau et le système nerveux du fœtus sont en développement rapide et particulièrement sensibles aux toxines. La perméthrine, qui agit en perturbant les canaux sodiques dans les cellules nerveuses des insectes, pourrait potentiellement avoir des effets neurotoxiques similaires, bien que plus subtils, chez les humains.
De plus, la perméthrine est suspectée d’être un perturbateur endocrinien, c’est-à-dire une substance chimique capable d’interférer avec le système hormonal. Les perturbations hormonales pendant la grossesse peuvent affecter le développement du fœtus, notamment au niveau du cerveau et des organes sexuels. Des études sur d’autres pyréthrinoïdes ont montré des effets sur le système endocrinien, bien que les preuves spécifiques concernant la perméthrine chez l’humain soient encore limitées. Le problème avec les perturbateurs endocriniens c’est que ce n’est pas la dose qui importe car ils ont des effets sur le système hormonal dès les très faibles doses d’exposition.
Exposition des jeunes enfants à la perméthrine : une population fragile à haut risque
Les jeunes enfants, et particulièrement ceux de moins de 2 ans, sont extrêmement vulnérables aux effets toxiques des substances chimiques comme la perméthrine. Leurs organes en développement, notamment le cerveau, sont beaucoup plus sensibles aux perturbations environnementales. En raison de leur métabolisme encore immature, ils sont également moins capables d’éliminer efficacement les toxines de leur corps. Cela signifie qu’une exposition chronique, même à de faibles doses, peut entraîner une accumulation plus importante de perméthrine dans leur organisme.
Les enfants, en raison de leurs comportements spécifiques (comme jouer par terre, explorer leur environnement avec leurs mains ou leur bouche), sont également plus susceptibles d’entrer en contact avec des résidus de perméthrine présents dans la poussière domestique. Une exposition prolongée à ces résidus présente des risques de troubles neurologiques. Les études animales ont montré que l’exposition chronique à la perméthrine entraine des troubles du développement comportemental et cognitif, tels que des difficultés d’apprentissage, des retards de développement ou encore des troubles de l’attention.
Quelles sont les principales voies d’exposition domestique à la perméthrine ?
Les principales voies d’exposition à la perméthrine dans les habitations sont l’inhalation et le contact cutané. Lors de l’utilisation de produits insecticides en aérosol ou de pulvérisateurs, les particules de perméthrine peuvent rester en suspension dans l’air, augmentant ainsi le risque d’inhalation, en particulier dans les espaces clos ou mal ventilés.
Les jeunes enfants, qui rampent et jouent souvent à même le sol, sont davantage exposés à travers le contact cutané avec des surfaces contaminées.
Les chambres d’enfants sont généralement les pièces les plus polluées de la maison. Le mobilier en bois, les parquets, les moustiquaires, les literies peuvent avoir été traités aves de la perméthrine qui se diffuse dans l’air intérieur de la chambre.
Quelle sont les précautions à prendre pour limiter son exposition à la maison ?
Pour minimiser les risques associés à l’exposition chronique à la perméthrine, en particulier chez les femmes enceintes et les jeunes enfants, plusieurs précautions peuvent être prises :
- Limiter l’utilisation de produits insecticides dans les espaces intérieurs, surtout en présence d’enfants ou de femmes enceintes.
- Aérer régulièrement les pièces après l’utilisation de produits insecticides pour réduire la concentration de particules dans l’air.
- Éviter les produits antiparasitaires pour animaux domestiques contenant de la perméthrine lorsque des jeunes enfants sont présents dans la maison.
- Privilégier des méthodes non chimiques pour lutter contre les nuisibles, telles que l’utilisation de moustiquaires non traitées ou de pièges mécaniques.
- Laver fréquemment les textiles susceptibles d’avoir été exposés à la perméthrine, en particulier les vêtements, tapis et draps, pour réduire les résidus.
- Choisir du mobilier et de la literie sans traitement insecticide.
En conclusion, bien que la perméthrine soit couramment utilisée dans les foyers et qu’elle soit généralement considérée comme un insecticide sûr lorsqu’elle est utilisée correctement, les risques associés à une exposition chronique, en particulier pour les femmes enceintes et les jeunes enfants, ne doivent pas être sous-estimés. Les preuves scientifiques disponibles, notamment issues d’études animales, soulèvent des inquiétudes quant aux effets potentiels sur le développement fœtal et neurologique des enfants. En attendant les progrès de la recherche sur ce pesticide, il est prudent de limiter l’exposition à cette substance dans les environnements où vivent des individus vulnérables, en prenant des précautions simples pour réduire les risques.
Bibliographie
Mesure des biocides en air intérieur | Atmo Nouvelle-Aquitaine
Pesticides – Les biocides domestiques les plus courants – Conseils – UFC-Que Choisir
Les pesticides – Observatoire de la Qualité des Environnements Intérieurs
Crédit photo Ronald Langeveld sur Unsplash